La notification ARE 19 représente l’un des documents administratifs les plus méconnus du système d’indemnisation chômage français. Contrairement à ce que son nom pourrait suggérer, cette attestation ne constitue pas un refus de droits, mais plutôt un document technique émis par France Travail dans des circonstances très spécifiques. Pour les créateurs d’entreprise et les demandeurs d’emploi naviguant dans le système complexe de l’assurance chômage, comprendre la nature exacte de l’ARE 19 s’avère crucial pour éviter toute confusion administrative.
Définition et cadre réglementaire de l’ARE 19 dans le système français d’indemnisation chômage
L’ARE 19, officiellement appelée « Attestation de Refus d’Émission », constitue un document administratif particulier dans l’écosystème de l’assurance chômage française. Cette attestation émane directement du règlement général d’assurance chômage annexé à la convention du 15 novembre 2024, qui encadre précisément les modalités d’indemnisation des demandeurs d’emploi.
Contrairement à une décision de rejet classique, l’ARE 19 atteste que France Travail se trouve dans l’incapacité administrative d’émettre une décision formelle de refus concernant une demande d’Allocation d’Aide au Retour à l’Emploi. Cette situation paradoxale survient lorsque le demandeur dispose théoriquement de droits ouverts mais ne souhaite pas en bénéficier effectivement.
Le document ARE 19 sert de pont administratif entre France Travail et l’URSSAF, permettant de justifier une situation d’indemnisation particulière sans constituer un refus de droits au sens strict.
Le cadre juridique de cette attestation s’inscrit dans la réglementation UNÉDIC qui régit l’ensemble du système d’assurance chômage. L’article L5422-1 du Code du travail précise les conditions d’attribution de l’ARE, tandis que les modalités techniques de l’ARE 19 relèvent des circulaires d’application spécifiques à France Travail.
Conditions d’éligibilité et critères d’attribution de l’allocation ARE 19
L’émission d’une notification ARE 19 répond à des critères très précis qui diffèrent fondamentalement de ceux de l’ARE classique. Cette attestation ne constitue pas une allocation à proprement parler , mais plutôt un justificatif administratif émis dans des cas de figure spécifiques.
Durée minimale d’affiliation et période de référence de 610 jours
Pour qu’une ARE 19 soit émise, le demandeur doit disposer de droits théoriques à l’ARE, ce qui implique de remplir les conditions d’affiliation minimales. Depuis la réforme de décembre 2021, la durée d’affiliation requise s’établit à 130 jours travaillés ou 910 heures sur les 24 derniers mois pour les moins de 53 ans, et sur 36 mois pour les 53 ans et plus.
Cette période de référence, communément appelée « période d’affiliation », détermine l’éligibilité aux droits à l’assurance chômage. L’ARE 19 ne peut être délivrée qu’aux personnes justifiant de cette durée minimale , même si elles choisissent de ne pas percevoir leurs allocations mensuelles.
Critères d’âge et seuils de 53 ans pour l’accès au dispositif
L’âge du demandeur influence directement les modalités d’attribution de l’ARE 19. Les critères d’éligibilité varient selon que le bénéficiaire ait moins de 53 ans, entre 53 et 54 ans, ou 55 ans et plus. Cette segmentation par âge reflète les différences de traitement dans le système d’indemnisation chômage français.
Pour les demandeurs de moins de 53 ans, la période de référence s’étend sur 24 mois, tandis que pour ceux de 53 ans et plus, elle couvre 36 mois. Cette différenciation impacte directement la possibilité d’obtenir une ARE 19, puisque les droits sous-jacents doivent exister pour que l’attestation soit émise.
Motifs de rupture du contrat de travail éligibles à l’ARE 19
L’ARE 19 ne peut être émise que si la rupture du contrat de travail correspond aux motifs légitimes reconnus par l’assurance chômage. Les licenciements pour motif personnel ou économique, les ruptures conventionnelles, les fins de CDD et certaines démissions légitimes constituent les principaux motifs éligibles.
La nature de la rupture contractuelle détermine non seulement l’ouverture des droits à l’ARE, mais également la possibilité d’obtenir une attestation ARE 19. Cette attestation ne peut jamais être délivrée pour des ruptures volontaires non légitimes , telles que les démissions simples sans motif reconnu.
Exclusions et situations particulières : démission, licenciement pour faute grave
Certaines situations excluent catégoriquement la délivrance d’une ARE 19. Les démissions sans motif légitime, les licenciements pour faute grave ou lourde, ainsi que les ruptures pendant la période d’essai à l’initiative du salarié ne permettent pas l’émission de cette attestation.
- Démissions simples sans motif légitime reconnu par l’UNÉDIC
- Licenciements pour faute grave ou lourde privant le salarié d’indemnités
- Abandons de poste assimilés à des démissions
Ces exclusions reflètent le principe général de l’assurance chômage qui ne couvre que les privations involontaires d’emploi. L’ARE 19, attestant de droits potentiels, ne peut donc concerner que des situations ouvrant droit à l’indemnisation classique.
Modalités de calcul et montant de l’allocation ARE 19
Il convient de préciser d’emblée qu’ l’ARE 19 ne constitue pas une allocation versée , mais une attestation administrative. Cependant, sa délivrance présuppose l’existence de droits calculés selon les modalités standard de l’ARE, dont il est important de comprendre les mécanismes.
Méthode de calcul basée sur le salaire journalier de référence (SJR)
Le calcul théorique sous-jacent à l’ARE 19 repose sur la détermination du salaire journalier de référence (SJR), élément central du système d’indemnisation. Ce SJR s’obtient en divisant la masse salariale de la période de référence par le nombre de jours calendaires de cette même période, dans la limite de 261 jours par année civile.
La formule de calcul du montant journalier comprend une partie fixe de 13,18 euros et une partie variable égale à 40,4% du SJR. Cette méthode garantit une progressivité dans l’indemnisation, les salaires les plus faibles bénéficiant d’un taux de remplacement plus élevé que les hauts revenus.
Application du coefficient de 75% et plancher minimum garanti
Le montant de l’allocation théorique ne peut excéder 75% du salaire journalier de référence, garantissant ainsi un plafond à l’indemnisation. Cette limitation vise à maintenir l’incitation au retour à l’emploi tout en assurant un niveau de vie décent aux demandeurs d’emploi.
Un plancher minimum garantit que l’allocation ne puisse descendre en dessous de 32,13 euros net par jour en 2025. Ce montant minimal assure une protection sociale de base , indépendamment du niveau de salaire antérieur, et s’applique également aux droits théoriques justifiant l’émission d’une ARE 19.
Plafonnement à 57% du salaire de référence selon la réglementation unédic
La réglementation UNÉDIC prévoit un mécanisme de plafonnement qui limite l’allocation à 57% du salaire de référence dans certaines configurations de revenus. Cette disposition concerne principalement les salaires élevés et vise à équilibrer la solidarité du système avec la responsabilisation des bénéficiaires.
Ce plafonnement s’applique automatiquement lorsque le calcul standard (partie fixe + partie variable) dépasse ce seuil de 57%. Il influence directement les droits théoriques qui sous-tendent l’émission d’une ARE 19, même si ces droits ne se traduisent pas par un versement effectif.
Impact des revenus d’activité partielle sur le montant de l’ARE 19
Les périodes d’activité partielle (chômage partiel) subies avant la fin du contrat de travail influencent le calcul du SJR et, par conséquent, les droits théoriques attestés par l’ARE 19. Ces périodes sont prises en compte dans la détermination de la rémunération de référence, mais selon des modalités spécifiques.
L’indemnité d’activité partielle, versée par l’employeur ou l’État, entre dans le calcul du SJR au même titre que le salaire normal. Cette intégration garantit que les salariés ayant subi des périodes de chômage partiel ne soient pas pénalisés dans leurs droits futurs à l’indemnisation.
Durée d’indemnisation et spécificités temporelles de l’ARE 19
Bien que l’ARE 19 ne donne lieu à aucun versement, elle atteste de droits théoriques assortis d’une durée d’indemnisation calculée selon les règles générales de l’assurance chômage. Cette durée dépend de l’âge du demandeur et de sa période d’affiliation, avec l’application du coefficient réducteur de 0,75 instauré en février 2023.
Pour les demandeurs de moins de 55 ans, la durée maximale d’indemnisation théorique s’établit à 548 jours calendaires après application du coefficient réducteur. Les 55-56 ans peuvent prétendre à 685 jours, tandis que les 57 ans et plus bénéficient de 822 jours maximum. Ces durées théoriques figurent dans l’ARE 19 même si elles ne se traduisent par aucun versement effectif.
La durée d’indemnisation théorique mentionnée dans l’ARE 19 peut être cruciale pour certaines démarches administratives, notamment dans le cadre de demandes d’aides sociales complémentaires.
Le mécanisme de modulation selon la conjoncture économique s’applique également aux droits théoriques. En période de faible chômage, la réduction de 25% de la durée d’indemnisation concerne aussi les attestations ARE 19, reflétant la cohérence du système d’assurance chômage dans ses différentes composantes.
Cette durée théorique revêt une importance particulière pour les créateurs d’entreprise bénéficiant de l’ACRE. L’URSSAF examine en effet la durée des droits potentiels pour déterminer l’éligibilité à l’exonération de cotisations sociales, même lorsque ces droits ne sont pas exercés.
Procédure de demande et démarches administratives auprès de pôle emploi
La demande d’ARE 19 ne suit pas les circuits classiques de demande d’allocation chômage. Cette attestation s’obtient généralement dans le contexte d’une demande d’ACRE auprès de l’URSSAF, lorsque le créateur d’entreprise justifie de droits au chômage sans souhaiter en bénéficier.
La procédure débute par l’inscription comme demandeur d’emploi auprès de France Travail, même si le demandeur n’a pas l’intention de percevoir d’allocations. Cette inscription permet l’ouverture d’un dossier et l’examen des droits potentiels. L’ARE 19 ne peut être émise qu’après cette étape préalable obligatoire .
Le demandeur doit ensuite formuler explicitement sa demande d’ARE 19 auprès de son conseiller référent ou du service indemnisation de son agence. Cette demande doit être motivée, généralement par la nécessité de justifier sa situation auprès d’un organisme tiers comme l’URSSAF.
- Inscription comme demandeur d’emploi auprès de France Travail
- Constitution du dossier avec les pièces justificatives habituelles
- Demande explicite d’ARE 19 auprès du conseiller référent
- Examen des droits théoriques par le service indemnisation
- Émission de l’attestation ARE 19 si les conditions sont remplies
Les délais de traitement varient selon les agences, mais l’ARE 19 est généralement délivrée dans un délai de 15 à 30 jours ouvrés. Ce document revêt un caractère officiel et doit être conservé précieusement par le demandeur pour ses démarches ultérieures.
Différences avec l’ARE classique et autres allocations chômage du régime général
L’ARE 19 se distingue fondamentalement de l’ARE classique par l’absence de versement effectif. Tandis que l’Allocation d’Aide au Retour à l’Emploi constitue un revenu de remplacement mensuel, l’ARE 19 n’est qu’une attestation administrative sans contrepartie financière directe.
Cette différence majeure implique des obligations distinctes pour les bénéficiaires. Les titulaires d’une ARE classique doivent s’actualiser mensuellement, rechercher activement un emploi et respecter leur projet personnalisé d’accès à l’emploi. Les détenteurs d’une ARE 19 n’ont aucune de ces obligations , puisqu’ils ne perçoivent aucune indemnisation.
L’ARE 19 diffère également des autres dispositifs d’aide aux demandeurs d’emploi comme l’ASS (Allocation de Solidarité Spécifique) ou le RSA. Contrairement à ces aides financières effectives, l’ARE 19 sert exclusivement de justificatif administratif dans des démarches spécifiques, principalement liées à la création d’entreprise.
Le cumul entre l’ARE théorique et d’autres dispositifs d’aide suit également des règles spécifiques. Contrairement à l’ARE classique qui peut être cumulée partiellement avec des revenus d’activité, l’ARE 19 n’entre dans aucun mécanisme de cumul puisqu’elle ne génère aucun versement. Cette particularité simplifie considérablement la gestion administrative pour les créateurs d’entreprise.
L’interaction avec les droits rechargeables constitue un autre point de distinction important. Alors que la perception d’une ARE classique épuise progressivement les droits du bénéficiaire, la détention d’une ARE 19 préserve intégralement ces droits pour un usage ultérieur en cas de cessation de l’activité entrepreneuriale.
L’ARE 19 représente une solution administrative élégante pour les créateurs d’entreprise souhaitant conserver leurs droits au chômage tout en bénéficiant des dispositifs d’aide à la création comme l’ACRE.
Cette préservation des droits s’avère particulièrement stratégique dans un contexte entrepreneurial où l’incertitude économique reste élevée. Les créateurs peuvent ainsi se lancer dans leur projet en conservant un filet de sécurité représenté par leurs droits à l’ARE, utilisables en cas d’échec de leur entreprise. Cette flexibilité constitue un avantage considérable par rapport aux autres dispositifs d’aide aux demandeurs d’emploi qui n’offrent pas cette possibilité de mise en réserve.
L’ARE 19 présente également des spécificités en matière de protection sociale. Contrairement aux bénéficiaires de l’ARE classique qui conservent leur affiliation à l’assurance maladie du régime général, les détenteurs d’une ARE 19 doivent organiser leur couverture sociale par d’autres moyens, généralement via le régime des travailleurs indépendants. Cette différence majeure doit être anticipée lors de la création d’entreprise pour éviter toute rupture de droits.
En termes de durée de validité, l’ARE 19 conserve sa pertinence administrative tant que les droits sous-jacents demeurent ouverts. Cette durée correspond à la période maximale d’indemnisation théorique, augmentée du délai de déchéance de trois ans prévu par la réglementation. Au-delà de cette échéance, l’attestation perd sa valeur juridique et ne peut plus être invoquée dans les démarches administratives.
Pour les organismes tiers comme l’URSSAF, l’ARE 19 constitue une pièce justificative de première importance dans l’instruction des dossiers ACRE. Elle atteste de manière incontestable que le demandeur remplissait les conditions d’éligibilité à l’indemnisation chômage au moment de la création de son entreprise, condition sine qua non pour bénéficier de l’exonération de cotisations sociales. Cette fonction probante explique l’importance accordée à ce document par les administrations compétentes.
La compréhension fine de ces différences permet aux créateurs d’entreprise de faire des choix éclairés quant à leur stratégie d’indemnisation. Opter pour l’ARE 19 plutôt que pour l’ARE classique ou l’ARCE représente une décision stratégique qui doit s’appuyer sur une analyse précise de la situation personnelle et des objectifs entrepreneuriaux de chaque créateur.